Le Sénégal perd progressivement ses atouts touristiques naturels. Après l’altération désastreuse du lac Rose, c'est maintenant au tour du désert de Lompoul de subir une transformation radicale sous l'effet de l'exploitation minière industrielle. Cette perte affecte profondément le patrimoine environnemental et touristique du pays.

Le désert de Lompoul représentait une attraction unique en Afrique de l'Ouest. Ses dunes dorées, atteignant jusqu'à 50 mètres de hauteur, offraient aux visiteurs une expérience authentique dans un environnement naturel exceptionnel. La proximité de l'océan Atlantique en faisait un site remarquable où les touristes pouvaient profiter d'une immersion dans un paysage désertique tout en restant proche du littoral.

L'entreprise Eramet Grande Côte (GCO), détenue à 90 % par le groupe Eramet et à 10 % par l’Etat du Sénégal, exploite une concession minière couvrant 445 000 hectares et s’étendant sur 100 kilomètres le long du littoral, au moins jusqu’en 2029. GCO avance inexorablement, transformant ce site naturel en zone industrielle. Le bilan environnemental s'avère catastrophique, alors que l'extraction du zircon bouleverse entièrement l'écosystème à mesure que les dunes disparaissent sous les bulldozers. La végétation, arrachée sans ménagement, cède la place aux installations minières, et les sols sont épuisés par une exploitation intensive. Plus inquiétant encore, la consommation massive d'eau par GCO assèche progressivement les nappes phréatiques locales, menaçant directement l'agriculture et la survie des communautés agricoles de la région.

L'impact social de cette exploitation minière frappe durement les habitants de la région. Les communautés locales, autrefois dynamiques grâce au tourisme et à l'agriculture, se retrouvent dans une situation critique. De nombreux agriculteurs perdent leurs terres cultivables en échange de compensations financières dérisoires, insuffisantes pour rebâtir une activité stable. Ceux qui conservent leurs parcelles voient leurs rendements et leurs revenus chuter en raison des perturbations environnementales. Les vendeurs de souvenirs ont vu leur clientèle touristique disparaître, tandis que les guides, les organisateurs d'activités et les hébergeurs font face à un effondrement de leur activité. Plus grave encore, cette déstabilisation économique pousse de nombreux jeunes à quitter la région, certains allant jusqu'à risquer l’émigration clandestine, un phénomène autrefois rare dans ce territoire. Ainsi, l'exploitation minière ne détruit pas seulement l'environnement, mais déchire aussi le tissu social et économique de toute une communauté.

L'entreprise tente de légitimer son action en mettant en avant la création d’emplois et des retombées fiscales. Pour relancer l'activité touristique dans la zone, elle a créé L'Oasis du Sénégal, un aménagement touristique avec des dunes reconstituées et une palmeraie. Cependant, cette tentative de reproduction ne peut égaler l'expérience authentique d'un environnement désertique modelé par la nature. La dimension sauvage du désert originel, façonné par les éléments pendant des millénaires, reste impossible à recréer artificiellement.

Cette création d'une oasis artificielle s'apparente à une opération de greenwashing, ou écoblanchiment, une pratique courante des entreprises minières à travers le monde. En tentant de compenser la destruction d'un site naturel par un aménagement artificiel, l'entreprise cherche à verdir son image et à minimiser l'impact réel de ses activités extractives. Cette stratégie de communication ne peut masquer la perte définitive d'un patrimoine naturel authentique, dont la valeur environnementale et touristique demeure inestimable.

Le développement économique promis par l'exploitation minière ne devrait pas se faire au détriment d'un patrimoine environnemental unique, qui constituait non seulement une source de fierté nationale et un atout important pour l'industrie touristique sénégalaise, mais aussi le fondement d'un équilibre social et économique local séculaire. La destruction du désert de Lompoul illustre tragiquement comment la quête de ressources minières peut compromettre irrémédiablement des écosystèmes précieux et des modes de vie traditionnels, sans que les bénéfices économiques attendus ne puissent véritablement compenser ces pertes irréversibles pour les communautés locales et le pays tout entier. Face à ce constat, il est impératif de repenser nos choix de développement pour que les générations futures ne soient pas condamnées à hériter d'un territoire dépouillé de ses richesses naturelles et culturelles, où les promesses éphémères de l'industrie extractive auront remplacé un patrimoine millénaire irremplaçable.

Pour en savoir plus sur ce sujet et découvrir tous les détails de cette situation, nous vous invitons à consulter l’excellent reportage publié sur le site de Reporterre, un média de l'écologie :

https://reporterre.net/Un-groupe-minier-francais-detruit-un-desert-unique-au-Senegal